Ce lundi 8 mars 2021, les femmes sont en grève !

L’année 2020 a marqué le 25e anniversaire de la quatrième conférence mondiale des Nations unies sur les femmes à Pékin, considérée comme un tournant pour la promotion de l’égalité entre les femmes et les hommes au niveau mondial.

Malgré tout ce temps passé et les efforts menés, nous n’en sommes toujours pas à une égalité entre les femmes et les hommes. A ce rythme-là, il faudrait attendre encore 100 ans pour atteindre l’égalité des sexes (d’après le Forum Économique Mondial).

Le rapport d’évaluation global du secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies en vue de la 64e session de la commission de la condition de la femme (tenue en mars 2020) va en ce sens.

Il a conclu que les progrès avaient été inégaux; l’action, le financement et l’obligation de rendre des comptes ne correspondaient pas aux engagements pris en 1995 et n’avaient pas traité de manière systématique les causes profondes des inégalités entre les femmes et les hommes et les violations des droits des femmes.

Bref, les causes profondes du patriarcat sont toujours bien là !

Les domaines d’inégalités sont nombreux… et renforcés par la Crise Covid-19

La crise sanitaire a renforcé les inégalités… Elle a eu des impacts importants sur les femmes et les filles dans tous les aspects de leur vie : au niveau de leur santé, y compris sexuelle et reproductive, en termes de violence accrue, dans l’accès à l’emploi, etc.

Faisons le point…

Femmes et injustices face à l’emploi

A l’échelle mondiale, près de 60 % des travailleuses dans le monde travaillent dans le domaine informel (cela monte à 70 % dans les pays dits en développement). C’est à dire qu’elles n’ont accès à aucune protection sociale (chômage, maladie-invalidité, pension, etc.).

Par ailleurs, à l’échelle internationale, 75 % du travail non rémunéré (prendre soin des enfants, des malades, des personnes âgées, des tâches ménagères) est assumé par des femmes. En Belgique, les femmes consacrent 1h30 en plus de travail non rémunéré par jour que les hommes (237 minutes contre 144) : source : OCDE). Ces tâches ont explosé pendant la crise du COVID-19, et les femmes se sont retrouvées encore plus accaparées.

Par ailleurs, le travail reste largement genré. En effet, les femmes sont principalement actives dans les secteurs des soins de santé et de l’action sociale, de l’enseignement et du commerce. En Belgique, 40 % des femmes occupent des postes dans les secteurs de la santé, du social et de l’éducation contre seulement 11 % chez les hommes. Soulignons que, plus il y a de femmes dans un secteur, moins les salaires sont élevés !

Pendant la crise sanitaire, les femmes ont donc été particulièrement exposées au virus, en occupant plus d’emplois de première ligne.

Les femmes travaillent aussi largement à temps partiel. 43,6 % des femmes salariées travaillent à temps partiel (pour 11,8 % des hommes).

En Belgique, l’écart salarial reste une réalité. En moyenne, les femmes gagnent un salaire horaire inférieur de 5,8% à celui des hommes. L’écart salarial brut reste lui de près de 24 %!

Ici encore, soulignons que les enjeux professionnels se renforcent davantage pour les femmes ayant d’autres facteurs de vulnérabilité : le handicap, l’origine, la précarité, etc.

Comme par exemple, les femmes sans papiers n’ont pas accès au marché de l’emploi formel. Selon Myria, il y a environ 150 000 personnes sans-papiers en Belgique dont 46 % sont des femmes.

Femmes et violences

Même avant la pandémie de COVID-19, la violence à l’égard des femmes constituait l’une des violations des droits humains les plus répandues. En Belgique, comme partout, les violences faites aux femmes ont été exacerbées par la crise, les victimes se retrouvant en confinement et donc coincées avec leur agresseurs. Bien que le nombre de faits de violence rapportés à la police pendant les confinements a baissé, les appels aux numéros d’urgence ont triplé et les demandes d’hébergement ont grimpé de 250% à Bruxelles. Il est bien évident aussi que si les violences touchent toutes les femmes, certaines y sont plus confrontées : les femmes racisées, précaires, trans…

Les violences envers les femmes prennent de nombreuses formes (physiques, sexuelles, économique, …). Ainsi, 36 % des femmes ont subi des violences physiques et/ou sexuelles avant l’âge de 15 ans et 24 % des femmes ont subi des violences physiques et/ou sexuelles de la part de leur partenaire/ancien partenaire. Dans certains cas les violences mènent à la mort de la victime. En ce 8 mars 2021, nous comptons déjà 7 féminicides en Belgique depuis le début de l’année.

En plus de cela, l’augmentation du temps passé sur internet pendant la pandémie a fait augmenter les violences sexistes en ligne et le nombre de cas d’abus sexuels en ligne sur des enfants et en particulier sur les filles.

En cette semaine du 8 mars, nous finalisons une résolution parlementaire portée par tous les groupes pour demander au gouvernement de renforcer son action contre les violences intrafamiliales.

Femmes et santé

Une dimension spécifique des femmes est celle liée à la santé sexuelle et reproductive.

La contraception

Dans le monde, une fille sur cinq donne naissance à son premier enfant avant 18 ans et près de 3 millions de filles âgées de 15 à 19 ans subissent des avortements à risque.

La crise du COVID-19 a eu un impact important sur la santé sexuelle et reproductive des femmes faisant perdre à 18 millions de femmes additionnelles dans le monde, l’accès à une contraception moderne1 .

En Belgique, même si la contraception est gratuite pour les femmes de moins de 25 ans et aux femmes bénéficiant du statut BIM, la contraception demeure une difficulté à laquelle de nombreuses femmes doivent faire face. Plusieurs obstacles demeurent : liberté d’accès, manque d’information, etc. N’oublions pas non plus que la responsabilité de la contraception pèse encore quasi exclusivement sur les épaules des femmes, la contraception masculine restant encore très largement taboue et peu investie.

Avec mon groupe Ecolo-Groen nous travaillons afin de changer ce système et partager la charge du coût et de la responsabilité de manière égale entre les femmes et les hommes.

L‘avortement

On le sait, en Belgique, de nombreuses femmes ne peuvent bénéficier d’une interruption volontaire de grossesse, car elles sont « hors délai », c’est à dire qu’elles ont dépassé les 12 semaines (de conception) prévues dans la loi. Parmi ces femmes, plus de 400 par an sont donc contraintes de se rendre aux Pays-Bas qui pratique l’IVG plus tardivement.

Pendant la crise COVID, le nombre d’IVG semble être resté stable. Mais pour pouvoir garantir ce droit fondamental aux femmes à pouvoir disposer de leur corps, les centres de prise en charge ont dû adapter leurs pratiques.

Mon groupe est favorable à la sortie de l’IVG du code pénal, à l’allongement du délai de 12 à 18 semaines ainsi qu’une réduction du délai de réflexion de 6 jours à 2 jours. Le contexte gouvernemental actuel nous oblige à évaluer la législation et les pratiques actuelles avant de prendre des initiatives législatives. Nous y travaillons et continuerons jusqu’à ce qu’on obtienne des résultats.

D’autres facettes de la santé des femmes doivent aussi être soulignées.

Une dimension supplémentaire à noter est la précarité menstruelle qui touche un nombre considérable de femmes et porte atteinte à leur dignité et leur santé. Ici aussi la crise COVID a des impacts importants. En poussant plus de femmes dans la précarité, elles sont plus nombreuses à devoir choisir entre des protections menstruelles ou d’autres biens de première nécessité.

Avec le secteur associatif spécialisé (notamment Bruzelle), nous portons cet enjeu important au parlement et cherchons les leviers pour faciliter l’accès des femmes en situation de précarité aux protections menstruelles.

Notons aussi que les violences obstétricales perdurent en Belgique. La crise COVID a dans ce cadre aussi touché les femmes. Dans de nombreuses salles d’accouchement, les parturientes ont été obligées de porter un masque pendant l’accouchement alors même que l’OMS demande de ne pas porter de masque pendant les activités physiques.

Après plusieurs interpellations auprès des ministres de la santé, j’ai obtenu un engagement du Ministre Vandenbrouck à échanger sur le sujet avec les associations professionnelles d’obstétrique et de gynécologie, pour aboutir éventuellement à des mesures uniformes. A suivre donc.

Les mutilations génitales féminines sont également une dimension de la santé des femmes. A l’échelle mondiale, plus de 200 millions de jeunes filles et de femmes qui sont en vie aujourd’hui ont été victimes de ces pratiques. Chaque année, dans le monde, plus de quatre millions de filles sont exposées au risque de subir des mutilations génitales féminines.

A l’échelle nationale, les dernières données collectées par le GAMS indiquent que 17 575 de filles et femmes excisées vivent en Belgique et 8 342 sont « intactes » mais à risque d’excision si aucun travail de prévention n’est effectué.

J’ai pu remettre ce dossier sur la table du parlement tant chez la Ministre de la coopération au développement que chez la Secrétaire d’État à l’égalité de genre.

Femmes et pouvoir : le plafond de verre…

La représentation des femmes en politique est une autre facette de l’inégalité des sexes. En Belgique, nous avions 31 % de femmes ministres en 2020 et 42 % de femmes parlementaires. Nous avons donc moins de femmes au pouvoir alors que les femmes sont plus nombreuses dans la société. Une amélioration est toutefois à noter au niveau fédéral, où nous avons pour la première fois dans l’histoire de la Belgique, un nombre égal de femmes et hommes ministres et secrétaires d’État. Par ailleurs, depuis l’avènement du gouvernement De Croo, il y a 45% de femmes parmi les ministres en Belgique.

Dans le monde de l’entreprise, selon l’enquête du Scan parue le 8 mars 2021 sur les 5 plus grosses entreprises publiques et les entreprises du Bel 20, cinq de ces entreprises ont moins de 33 % de femmes dans leurs conseil d’administration malgré l’existence de la loi quota de 2011. Dans les comités de direction, c’est bien pire : 18 entreprises sur 25 ont moins d’1/3 de femmes dans leurs comités de direction.

Le problème ? Bien que la loi quota impose d’avoir un certain nombre de femmes dans les comités d’administration et de direction, les sanctions y relatives ne sont jamais appliquées.

Je ferai le point cette semaine du 8 mars avec la Secrétaire d’État pour voir comment la loi peut-être mieux appliquée, et le cas échéant modifiée.

Femmes, changement climatique, consommation, et luttes écoféministes

Premier constat : Le changement climatique impacte davantage les femmes.

Il est de plus en plus évident que les femmes sont plus vulnérables que les hommes au changement climatique, en grande partie parce qu’elles représentent la majorité des pauvres dans le monde (sur le 1,3 milliard de personnes vivant dans des conditions de pauvreté, 70% sont des femmes) et dépendent davantage des ressources naturelles menacées. Dans le monde entier, les femmes ont moins accès que les hommes aux ressources, telles que la terre, les crédits, les intrants agricoles, les structures de prise de décision, la technologie, la formation et les services de vulgarisation qui renforceraient leurs capacités à s’adapter aux changements climatiques.

Pourtant les femmes sont au cœur de la transition. Partout, les femmes sont en première ligne tant des stratégies de résilience fasse aux catastrophes, mais aussi dans les mécanismes de sensibilisation et d’actions collectives pour le changement.

Deuxième constat : Le monde dans lequel nous vivons est à la fois basé sur l’exploitation du travail des femmes et l’exploitation du vivant (qui entraînent le dérèglement climatique et l’effondrement des écosystèmes). Il nous faut donc repenser les relations entre les genres en même temps qu’entre les humains et la nature. C’est le constat qui est au coeur des luttes écoféministes.

Troisième constat : La société de consommation a un rôle central, tant dans la catastrophe climatique que dans la reproduction des rôles genrés et stéréotypes sexistes dans la société. S’émanciper dans la société de consommation est donc un processus moteur dans la lutte contre les catastrophes environnementales et le patriarcat !

Le 8 mars est dès lors un bon moment pour refaire le point sur cette double exploitation ! C’est pourquoi, le Collecti•e•f 8 Maars appelle à faire la grève de la consommation. C’est un appel à ne pas consommer de produits issus de l’agro-industrie, de produits polluants, ou simplement de produits inutiles, mais aussi des produits véhiculant des représentations sexistes du rôle des femmes dans la société.

Toutes ces raisons, et les autres, font que les femmes se mobilisent le 8 mars !

Ainsi, l’association Marche mondiale des femmes se bat depuis des années pour l’égalité entre les femmes et les hommes et organise chaque année des manifestations à cet effet. Vers leur site

Le collecti•e•f 8 maars appelle à une grève féministe depuis peu. Vers leur site

Ce lundi, nous soutiendrons les actions en lien avec la lutte pour les droits des femmes.

Nous pouvons retenir une chose de cette crise COVID-19 : quand le monde s’arrête, les femmes continuent !

Plus de données chiffrées sur les inégalités femmes-hommes –> par ici