Faut-il le rappeler, les dettes des pays dits « en développement » font peser un poids significatif sur leurs capacités à rencontrer les besoins prioritaires de leurs populations. De plus, les impacts de la crise du Covid touchent particulièrement durement les pays dits en développement et aggravent encore la situation.

D’après les estimations de la Banque mondiale, la pauvreté dans le monde pourrait repartir à la hausse pour la première fois depuis 1990. Et ce, quel que soit le scénario envisagé. Par ailleurs, cette hausse pourrait représenter un recul d’une dizaine d’années sur les progrès réalisés pour réduire la pauvreté selon certains scénarios.

Le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) estime la perte de revenus liée au Covid-19 pour les pays en développement à au moins 220 milliards USD. Cette perte de revenus s’explique notamment par la baisse des transferts financiers des migrant·e·s vers leur pays d’origine, par l’effondrement du commerce international, par la chute du prix des matières premières, par l’effondrement du secteur informel, etc.

Dans ce contexte, il est intéressant de s’attarder sur une des dimensions de la vulnérabilité des pays en développement : la crise de la dette à laquelle ils sont confrontés. En effet, la dette totale des pays en développement est passée de 100% à 193% de leur PIB entre 2008 et 2018, soit le plus haut niveau jamais atteint. Cela implique pour les pays en développement de devoir rembourser 2700 milliards de dollars de dettes souveraines d’ici fin 2021. Parmi ces 2700 milliards, 562 milliards concernent les pays à faible et moyens revenus. Par conséquent, le poids de la dette est tel que son remboursement empêche les pays du Sud de satisfaire aux besoins fondamentaux de leurs populations. De plus, il met en défaut les pays débiteurs et créanciers d’atteindre les objectifs de développement durable (ODD). Il y a là un véritable enjeu, mais aussi un levier à actionner.

Dès lors, de nombreuses voix se font entendre pour appeler à annuler ou à postposer les remboursements des dettes des pays en développement. C’est le cas du Secrétaire Générale des Nations-Unies et de la CNUCED, mais aussi de la Banque Mondiale et du FMI. Ces appels restent néanmoins partiels et ne répondent dès lors pas vraiment aux besoins des pays concernés.

Ainsi, la Belgique a annoncé un moratoire jusqu’en mars 2021 des dettes bilatérales belges des pays IDA.

Néanmoins, vu les enjeux auxquels les pays du Sud sont confrontés, les écologistes estiment que c’est une annulation des dettes qui est nécessaire pour permettre aux pays les plus fragiles de répondre prioritairement aux urgences de leurs populations, à savoir le renforcement des systèmes de soin de santé, la protection sociale, l’alimentation et l’éducation.

Je suis le dossier depuis le Parlement

Ce 22 avril 2020 en commission, j’ai interrogé le ministre De Croo au sujet du poids de la dette bilatérale vis-à-vis de la Belgique. Il en ressort que le total des dettes bilatérales vis-à-vis de la Belgique s’élève à 282 millions d’euros et que le total des dettes des pays IDA vis-à-vis de la Belgique s’élève à 246 millions d’euros.

Ensuite, ce 3 juin 2020, j’ai déposé une proposition de résolution qui demande au gouvernement :

Au niveau belge

1. d’annuler sans conditions les paiements de la dette bilatérale des pays “en développement” dont la Belgique est créancière en 2020 et 2021 sans inscrire les montants annulés dans son aide publique au développement ;
2. de procéder à un audit transparent de ses créances bilatérales en associant les pays débiteurs et la société civile ;
3. de conditionner les aides publiques aux créanciers privés à l’annulation des paiements des dettes des pays en développement prévus pour les années 2020 et 2021 ;

Au sein des instances multilatérales

4. de plaider dans les instances internationales pour un moratoire sans conditions suivi d’une annulation de la dette, notamment en soutenant le plan de la CNUCED ;
5. de plaider pour l’extension de tel plan, de manière contraignante, aux créanciers privés en conditionnant notamment les aides au secteur privé à l’obligation d’annu-ler leurs créances envers les pays en développement ;
6. de plaider pour que les autres États et l’UE adoptent des législations équivalentes à la loi belge du 12 juillet 2015 relative à la lutte contre les activités des fonds vautours ;
7. de s’assurer que l’ensemble des solutions mises en œuvre pour la dette le soient dans le respect du droit international et des droits de l’homme.

→ On en parle aussi dans la presse ! Retrouvez mon interview dans La Libre « Pour Écolo, la Belgique doit jouer un rôle actif dans l’annulation des dettes des pays pauvres »