Depuis l’émission Investigation de la RTBF sur les PFAS le 8 novembre 2023, nos communautés (re)découvrent avec effroi l’ampleur du problème posé par ces polluants chimiques éternels. Le reportage se concentre sur les fuites industrielles qui sont des causes massives de pollutions aux PFAS dans notre eau notamment.

Mais ces substances per et polyfluoroalkylées (PFAS) ne sont pas seulement présentes dans nos objets du quotidien, ils le sont aussi dans notre alimentation. En effet, un rapport des organisations Generations Future et PAN Europe (Pesticide Action Network) a récemment révélé qu’un grand nombre de pesticides autorisés en Europe (37) et en Belgique (30) appartiennent à la famille des PFAS. (Lien vers étude : https://www.pan-europe.info/resources/reports/2023/11/europes-toxic-harvest-unmasking-pfas-pesticides-authorities-europe)

Les PFAS sont des composés chimiques utilisés pour modifier les caractéristiques d’un matériau. Ils peuvent rendre un matériau hydrofuge, ignifuge, plus résistant, plus souple etc. Dans le cas des pesticides, la structure carbone-fluor qui caractérise les PFAS est intégré dans les pesticides pour améliorer leur persistance et leur durabilité. En d’autres termes, ces pesticides PFAS nocifs peuvent à présent l’être pendant beaucoup plus longtemps.

Au total, ces 30 pesticides à base de PFAS autorisés sur le marché belge représentent 11% de toutes les substances actives autorisées sur le marché belge !!! Cela représente près de 150 tonnes de pesticides pulvérisées chaque année dans les champs belges. Cette autorisation est validée par le ministre fédéral de l’agriculture, Mr Clarinval.

Parmi les substances autorisées, 6 font pourtant partie de la liste EU des produits dangereux qui doivent être éradiqués. En raison de leur nocivité, ces « candidats à la substitution » doivent être impérativement remplacés par des produits moins nocifs, et ne peuvent être utilisés qu’en cas d’absence totale d’alternative viable.

En juillet 2022, j’interpellais déjà le Ministre Clarinval quant à l’autorisation en Belgique d’un grand nombre de produits candidats à la substitution (44 sur 55 de la liste européenne) dont l’usage va croissant au lieu de disparaître. Il a botté en touche et ne s’est donc pas engagé à éradiquer ces produits dangereux. Un an et demi plus tard, les 6 pesticides PFAS candidats à la substitution autorisés en Belgique sont donc toujours sur le marché.

J’ai récemment demandé au ministre de confirmer ces chiffres et de s’exprimer sur la présence de PFAS dans les pesticides. Il me confirmait que les pesticides PFAS représentent 11% du nombre de pesticides autorisés, pour presque 5% en termes de volumes vendus.

Cela ne semble pourtant pas alarmer Monsieur le Ministre pour qui la réglementation européenne est suffisante. D’après lui, tant que ces produits ne sont pas interdits, ils peuvent continuer à être déversés dans l’environnemental malgré les preuves scientifiques sur le caractère de perturbateurs endocriniens des PFAS.

Cette pollution chimique, contrairement aux fuites industrielles qui ont un caractère accidentel (ou plutôt de négligence), est connue et intentionnelle. D’énormes quantités de polluants éternels sont ainsi librement et directement pulvérisés dans l’environnement par les pesticides, pour continuer à faire fonctionner une agriculture conventionnelle sous perfusion d’intrants chimiques.

On ne peut s’étonner de retrouver des PFAS partout, quand on en met partout.

Avec mes collègues, on continue à lutter pour que notre agriculture puisse transitionner vers un modèle respectueux de notre santé et de notre environnement, loin de la dépendance aux entreprises agro-chimiques.