Le dossier de l’exportation des pesticides interdits en Europe avance !

Pour rappel, des études de la société civile (Public Eye et Oxfam UK) ont montré que l’Europe exporte massivement des pesticides qu’elle interdit sur son propre sol à cause de leur dangerosité pour notre santé et/ou notre environnement.

J’en parlais déjà ici : https://severinedelaveleye.ecolo.be/2021/11/19/la-belgique-exporte-massivement-des-pesticides-interdits-en-europe/

En résumé, rappelons que la Belgique a exporté 5.000 tonnes de pesticides en 2018 et 4.000 en 2020 avec comme principales destinations les États-Unis, le Brésil, le Japon et l’Ukraine, mais aussi le Maroc, l’Inde, la Malaisie ou le Mexique.

J’ai plusieurs fois interpellé la Ministre fédérale de l’environnement, Mme Khattabi, sur ce dossier.

En effet, l’Europe, après avoir annoncé vouloir avancer, avance trop lentement sur une interdiction de cette pratique éthiquement et environnementalement scandaleuse. Dès sa prise de fonction, la Ministre a montré son souhait de mettre fin à ces exportations.

Elle a maintenant concrétisé son souhait en soumettant un projet d’arrêté royal en vue de cesser l’exportation de pesticides interdits d’utilisation en Europe dès juillet 2023. Le texte a été avalisé fin novembre par la Conférence interministérielle de l’environnement (CIE) et est à présent soumis à une demande d’avis de la Commission européenne et des divers organes d’avis.

Ce n’est donc pas encore fait. Il faudra à la Ministre le soutien de son gouvernement, ce qui n’est pas encore gagné, mais le processus est lancé ! Et comme c’est une évidence environnementale, une évidence en termes de santé publique (y compris pour les européens puisque les aliments produits avec ces pesticides reviennent dans nos assiettes), et de justice Nord-Sud, on a de bons espoirs !

Elle a par ailleurs le soutien de la société civile qui mène depuis plusieurs mois une campagne active sur ce dossier. https://www.sosfaim.be/stop-pesticides/

Rappelons que la Belgique ne serait pas la première à avancer plus vite que l’Europe. La France a été le premier pays à interdire ce type d’exportation. Une étude de la même société civile montre néanmoins que malgré cette interdiction, la France continue d’exporter des milliers de tonnes de pesticides interdits en Europe, à cause d’une faille dans la législation, qui ne proscrit que l’exportation des « produits » et pas l’exportation des substances actives elles-même. Entre janvier et septembre 2022, les autorités françaises auraient approuvé 155 demandes d’exportation pour des pesticides interdits, ce qui représente au total 7.475 tonnes de produits, fongicides, herbicides ou insecticides. Un volume en net recul toutefois comparé aux 28.479 tonnes expédiées pour l’année 2021, avant la nouvelle législation.

Ces avancées nationales, pour pertinentes qu’elles soient, ne doivent pas empêcher l’Europe d’avancer. En effet, les géants de l’agrochimie (par exemple Syngenta) possèdent des filiales et des infrastructures dans toute l’Europe, et il leur est relativement facile de délocaliser la production et l’exportation de ces pesticides interdits vers des pays voisins.

La presse en parle : https://www.lesoir.be/481023/article/2022-12-04/la-belgique-interdira-lexportation-des-pesticides-les-plus-dangereux