La COP27 se déroulera du 7 au 18 novembre à Charm-el-Cheikh en Egypte. Un rendez-vous qui reste d’une importance capitale pour relever l’ambition climatique internationale et construire une justice climatique avec les pays dits du Sud.

Pourquoi en Égypte?

La présidence des COP change chaque année et fonctionne sur base d’un système de tournante selon un ordre défini entre les 5 groupes régionaux de l’ONU : Afrique, Asie-Pacifique, Amérique latine et Caraïbes, Europe de l’Ouest élargie et Europe de l’Est. Chaque groupe régional se met d’accord en interne sur une candidature et celle-ci est ensuite soumise à l’accord du secrétariat de l’ONU sur les changements climatiques (CCNUCC). Cette année, il revenait au groupe Afrique d’organiser la COP27 et l’Égypte était le seul pays en lice pour la présidence de la COP. Voilà donc comment l’Égypte est amenée à présider et donc, accueillir sur son sol, la COP27 dans 3 jours.

Il s’agit de la première COP organisée sur le continent africain depuis 2016 et la COP22 de Marrakech, au Maroc. Organiser l’évènement sur le continent est une opportunité de mettre l’accent sur les défis spécifiques rencontrés par les pays africains, notamment la question des pertes et dommages, un enjeu central de la justice climatique. En effet, l’Afrique contribue pour moins de 4 % aux émissions mondiales de gaz à effet de serre, mais souffre de manière disproportionnée des impacts négatifs du changement climatique. Je parle plus en détails des pertes et préjudices ici.

Cependant, il reste néanmoins préoccupant qu’une rencontre internationale d’une telle importance pour l’avenir de l’humanité se tienne dans un pays aussi peu respectueux des droits humains.

La question des droits humains en Égypte 

L’Égypte d’Al-Sisi est l’Égypte de la répression : depuis le coup d’État par le général Al-Sisi en 2013, les opposants politiques, les journalistes, les syndicalistes ou encore les défenseurs des droits humains et environnementaux font l’objet d’une répression brutale par le biais de stratégie d’intimidation, d’incarcération de masse, de disparitions forcées, de traitements inhumains et dégradants ou encore de torture.

Selon Human Rights Watch, au moins 60 000 personnes ont été arrêtées ou inculpées par les autorités égyptiennes depuis le coup d’État militaire de 20131. La répression par l’état égyptien est d’ailleurs renforcée par l’utilisation abusive de leur législation antiterroriste : de nombreux militants emprisonnés sont accusés, ou ont été condamnés, pour avoir soutenu des entités terroristes en raison de leurs activités politiques non violentes ou de l’exercice de leur droit à la liberté d’expression.2

Les disparitions forcées sont également un moyen de répression employé par le régime en place. En 2020 notamment, suite à la publication d’un rapport sur la situation en Égypte, Human Rights Watch et l’organisation de défense des droits humains Belady-An Island déclaraient que la police égyptienne, l’Agence de sécurité nationale et des responsables militaires du pays avaient procédé à l’arrestation arbitraire, à la disparition forcée et à la torture d’enfants, parfois âgés de seulement 12 ans, avec la complicité de procureurs et de juges qui ont fermé les yeux sur ces violations. Des enfants mineurs avaient disparu pour des périodes allant parfois jusqu’à 13 mois.

En 2017, le Comité contre la torture des Nations unies déclarait, à la suite d’une enquête sur l’Égypte, que les faits recueillis par le comité « conduisent à la conclusion inéluctable que la torture est une pratique systématique en Égypte ». En effet, selon un autre rapport d’Human Rights Watch, « des policiers et agents de la sécurité torturent systématiquement les prisonniers politiques à l’aide de techniques telles que les passages à tabac, l’électrocution, les positions douloureuses et parfois le viol ».

A cela on peut ajouter que l’Egypte est le troisième pays dans le classement du nombre d’exécutions par peine de mort (derrière la Chine et l’Iran). D’après Amnesty International, au moins 356 personnes ont été condamnées à mort par des tribunaux égyptiens en 2021.

Contexte de répression autour de la COP

L’organisation de la COP27 a été l’occasion pour les autorités égyptiennes de renforcer encore leur contrôle de la société civile.

Par ailleurs, le Réseau égyptien pour les droits de l’homme (ENHR) a déclaré qu’au cours des deux dernières semaines du mois d’octobre, les autorités locales de sécurité ont lancé une campagne d’arrestations dans le gouvernorat de Suez, au cours de laquelle plus de 200 personnes ont été arrêtées.3

Dimanche dernier, Ajit Rajagopal, un militant indien, a été arrêté peu après avoir entamé une marche de 8 jours entre Le Caire et Charm el-Cheikh dans le cadre d’une campagne mondiale de sensibilisation à la crise climatique. D’après un groupe local de défense des droits de l’homme, au moins 67 personnes ont été arrêtées au Caire et dans d’autres villes égyptiennes ces derniers jours, les autorités tentant de réprimer toute manifestation.

Les autorités égyptiennes ont, par ailleurs, clairement indiqué que les manifestations ne seraient autorisées que dans une zone spécialement aménagée à l’écart du centre de conférence où les dirigeants mondiaux prendront des décisions vitales sur l’action climatique.4

L’action des écologistes

La société civile, notamment Amnesty international, mais aussi le collectif des organisations indépendantes de défense des droits humains égyptiennes (https://copcivicspace.net/about-us/) demandent que la COP27 soit une opportunité pour renforcer la pression sur les autorités égyptiennes, et mettre en lumière les abus systématiques sur les droits humains.

Comme écologistes, c’est ce que nous tenterons de faire.

  • A travers d’une résolution parlementaire déposée à la Chambre, à l’initiative de Simon Moutquin5

Cette résolution demande notamment que la Belgique mène des efforts au sein du Conseil des droits de l’homme des Nations Unies, pour la mise en place d’un mécanisme d’enquête sur les graves violations des droits humains commises par les autorités égyptiennes mais aussi d’envisager toutes les initiatives diplomatiques possibles (bilatérales, au sein de l’Union européenne ou encore multilatérales) pour obtenir la libération des défenseurs des droits humains et des prisonniers politiques.

  • En demandant publiquement de rendre visite à plusieurs défenseurs et défenseuses des droits humains actuellement incarcérés pendant la COP27

    A mon initiative, avec les différents parlementaires écologistes européens (des parlements nationaux et du parlement européen) qui seront présents à la COP27, nous écrivons au procureur général et au ministre de la Justice pour demander l’autorisation de rendre visite à 9 personnes dans différentes prisons. C’est l’occasion de renforcer la pression et espérons le, de faire bouger les lignes aux côtés des organisations de la société civile.

Vous voulez participer ? Relayer la campagne pour les droits humains portée par la société civile : https://copcivicspace.net/be-part-of-the-campaigns/

Pas de justice climatique sans droits humains !

#FreeThemAll